"Les livres ne remplacent pas la vie, ils l'élargissent.
"Françoise Gasparri

jeudi 24 décembre 2009

La Guerre des boutons devant les juges


Comment notre société traiterait-elle le Grand Gibus, le Petit Gibus, La Crique, aujourd’hui ? Question à laquelle Bertrand Rothé répond après avoir interrogés des policiers et des magistrats.

Lorsqu’il écrit sa Guerre des Boutons, Louis Pergaud voulait en faire une photographie du regard d’adulte posé sur la brutalité de l’enfance et sur la façon dont elle s’inscrivait dans la société de l’époque, marquée par les luttes anticléricales et les progrès de l’instruction primaire. B. Rothé s’est amusé à donner une suite contemporaine à cette guerre enfantine, en se demandant quel sort serait réservé au Lebrac and Co par notre société.
Aztec des Gués, chef de la bande des Velras, se présente avec sa mère au commissariat afin d’y porter plainte pour agression. Il a été battu à coups de badine par les membres de la bande des Longeverne. Pourtant, il se refuse de citer les noms de ses agresseurs. La machine judiciaire se met alors en route. Interpellé, Lebrac dit « Grand Braque », chef de la bande des Longeverne, est accusé d’être impertinent, ordurier, inscolarisable, coupable de violence. Mis en garde à vue, transféré au dépôt du Palais de Justice, présenté au juge des mineurs, il est laissé en liberté, sous contrôle judiciaire. Quelques semaines plus tard, après une nouvelle bataille avec la bande adverse, Lebrac est incarcéré à Fleury-Mérogis, et traduit en comparution immédiate. Il est condamné à trois mois de prison ferme de réclusion. Placé en foyer à sa sortie de prison, Lebrac semble se ranger. Mais une vieille affaire de vol, va le rattraper.
L’idée de faire revivre les héros d’un classique est à la fois savoureuse et brillante, même si le constat est douloureux. Si l’auteur dénonce une justice toujours plus répressive, il sait montrer des avocats, des éducateurs, des juges qui font tout leur possible pour épargner aux jeunes délinquants l’incarcération. L’ouvrage se termine sur une postface signée Laurent Bonelli, sociologue pose une question essentielle : Comment s’étonner de la violence de jeunes, auxquels on avait fait croire, par le biais d’un statut de lycéen, à « l’égalité des chances via l’école » et qui se rendent compte que d’autres étaient plus égaux qu’eux. ?

Lebrac trois mois de prison par Bertrand Rothé. – Edition du Seuil, 2009. – 284 p. 18 euros

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